lundi 22 décembre 2008

LES VOYAGES OUTRE-MER DU CURÉ CORBEIL
(XIX)
Le long périple de 1925


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Causerie du 10 mai 1925 (Seizième tranche)
P A R I S
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Paris. Sept ponts sur la Seine.
Toutes les cartes reproduites dans cette page

proviennent de mes archives et ont été soit rapportées par
Corbeil soit expédiées par lui.

Les photos sont également de mes archives personnelles
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« ‘ Paris n’est pas seulement une ville – disait quelqu’un – c’est tout un monde ’. Un autre disait : ‘Paris a quelque chose de spécial; toutes les villes ont des admirateurs, mais Paris a des amoureux’, et ces paroles sont vraies. Vous me direz peut-être : ‘Mais dites-nous ce qu’il y a dans Paris pour faire tant d’amoureux?’ Tout est là, tout ce que l’art, tout ce que le génie humain, tout ce que la noblesse des sentiments, tout ce que l’héroïsme a pu faire, on le trouve là. Il y a de tout à Paris, chacun y revient avec satisfaction. On trouve tout dans Paris : ceux qui y vont pour leur plaisir; ceux qui y vont pour y chercher des trésors de science et d’art les trouvent dans Paris; ceux qui y vont pour y chercher un peuple laborieux, un exemple de travail, le trouve[nt] dans Paris. Vous voulez maintenant y trouver un exemple de piété : montez à Montmartre et, là, vous verrez prier. »

Paris. Le Sacré-Cœur.

« Ceux qui y vont en reviennent amoureux. En parlant de Rome, un pape demandait aux voyageurs qui visitaient la ville : ‘Combien de temps avez-vous passé à Rome? ‘ Les uns répondaient : ‘15 jours.’ Alors, il leur était répondu : ‘Au revoir.’ Mais à Paris, ceux qui n’y ont passé qu’un jour peuvent néanmoins dire : ‘Au revoir.’

Paris est le siège du gouvernement et des grandes administrations de l’État. Nous y trouvons de grands musées d’art, de science et d’industrie; nous y avons là tout ce que le monde a pu réunir de beau sur la terre. Les monuments élevés dans cette ville ne cessent de redire les gloires passées. Tant de souvenirs s’y trouvent réunis. Mais, depuis des centaines d’années, le génie humain a écrit les plus belles pages de l’histoire du monde dans ce Paris. En voyant le Dôme des Invalides, notre pensée se porte vers Napoléon. On le revoit au commencement de son histoire alors que, pauvre, il débarquait à la gare de Lyon. Vingt ans après, il est acclamé, fêté; Paris est à genou devant lui. »

Paris. Les Invalides.

« J’ai été conquis par Paris, J’y ai fait de bons amis; de bonnes familles françaises m’ont reçu gracieusement. J’ai appris à connaître le Paris laborieux, des hommes dans le commerce, des héros de la guerre. Le Paris généreux avec ses idées nationalistes. J’ai pu applaudir Daudet, acclamé le cardinal Dubois. J’y ai également vu jouer le drame de la Passion et j’y ai entendu chanter les plus grands artistes du monde. »
(À suivre)

Paris. L’Avenue des Champs-Élysées

Paris. Le lac du Bois de Boulogne.

Paris. Parc des buttes Chaumont.



À Éliane Bergeron

Paris, 4 mars 1925

Ma chère Éliane,

Ta dernière missive était sans doute bien éloquente par l’image ! Mais un peu courte. J’ai la pensée écrite. Elle m’a fait plaisir tout de même et je te remercie tout en ayant l’envie de te gronder pour n’écrire pas plus longuement et plus souvent. – Mais c’est fait et quand tu recevras cette lettre, je serai à la veille de partir. – Comme ce sera charmant de retourner dans ma chère paroisse et de revoir toutes les chères âmes qui me font la vie si agréable.-
Je ne fais qu’arriver à Paris. – Je commence à lier des relations, j’espère me faire de bons amis. Demain j’irai entendre Daudet et les gros canons royalistes, et vendredi, j’assisterai à la grande démonstration catholique à la salle Wagram. Ce sera un bon commencement. J’entendrai l’Aiglon et les cloches de Corneville cette semaine. –
Comme tu vois, je ne perds pas mon temps. J’espère que je t’intéresserai quand je serai de retour.
Bien cordialement.

Eug. C. ptre

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ÉLIANE BERGERON, ma tante et ma marraine

Éliane Bergeron.

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J’ai eu la surprise de découvrir, dans le carnet que consacre Pierre Cantin à Sanmaur et aux Hauts-Mauriciens,
(http://sanmaur-mauricie-cantin.blogspot.com/),
la reproduction de cet entrefilet d'un carnet mondain consacré à Éliane,qu'il a trouvé dans l’édition du 29 avril 1926 de l’hebdomadaire, The St. Maurice Valley Chronicle, publié à l'époque àTrois-Rivières.

Éliane, jeune fille.

Je dois beaucoup à ma tante Éliane, l'ainée de la famille de Joseph-Honoré Bergeron et d'Élodie Paquet, qui, en plus d'être ma marraine, fut pour moi une deuxième mère. Son désir de maternité ayant été assombri par la perte d'un bébé et d'une fausse-couche causée par une grossesse ectopique, elle déversa sur moi son amour maternel.
C'est elle qui m'a enseigné toutes les matières scolaires de la première année et, à 6 ans, j'entrai sans difficulté en deuxième année.
Toutes les semaines, elle m'achetait un livre, québécois de préférence. Plus tard, j'héritai de sa bibliothèque, riche en classiques, biographies, livres d'art, récits de voyage. Aujourd'hui, ce sont ses arrières-petits-neveux et nièces qui les utilisent pour leurs études universitaires.
Généreuse, elle aida financièrement ses plus jeunes frères et sœurs à poursuivre des études.
Très jolie, elle fut, paraît-il, une jeune fille très populaire à La Tuque. On lui a connu plusieurs fiancés, mais ce n'est que dans la trentaine qu'elle trouva enfin celui qui réussit à la charmer : Jules Trottier.
Éliane est décédée à l'âge de 99 ans et 10 mois, le 17 octobre 2003.

Micheline et sa marraine, à l’occasion du 90e anniversaire de celle-ci.

Dans un recueil de textes sur la famille Bergeron, ma tante livrait quelques éléments de sa vie.

«Je ne connais guère ma paroisse natale. Mon père a pris pignon sur rue à Lyster et ensuite à La Tuque. Cette fois, ce fut pour plus d'un demi-siècle. J'ai donc quitté le 'pays de mes ancêtres' alors que j'avais tout juste l'âge de raison. Après mes premières années de scolarité, j'entre à l'École normale de Nicolet, dirigée par les religieuses de l'Assomption. À 16 ans, j'obtenais mon brevet académique d'enseignement.

De l'Université Laval de Québec, je reçois un diplôme supplémentaire en culture générale. Étant trop jeune pour enseigner, j'étudie une année supplémentaire au pensionnat de Nicolet, en attendant d'avoir 18 ans. En 1921, je me lance dans l'enseignement. C'est ce que je désirais! Pour débuter, on m'envoie dans une école de rang**, où j'ai la responsabilité d'élèves de 5 à 18 ans, de niveaux multiples. Puis, pendant 11 ans, j'enseigne au pensionnat de La Tuque***.

Le 4 janvier 1934, j'unis ma destinée à Edmond-Jules Trottier. Cérémonie religieuse en l'église St-Zéphirin de La Tuque, et je déménage à Montréal. Pour occuper mes loisirs, je m'inscris à l'Université de Montréal, où j'obtiens, en 1937, un parchemin en Sciences sociales. Je fais quelques années de bénévolat et, après le décès de mon époux, en 1951, je retourne à l'enseignement. Et j'y tiens le coup durant 21 ans, dans la ville de Montréal.

Pour moi, il n'y a pas de troisième âge; je remercie le Seigneur de me donner une bonne santé, malgré mes 84 ans. Durant mes années de retraite, je fais de grands voyages, dont six en Europe, non seulement dans le but de me promener, mais toujours avec l'idée de développer mes connaissances.

' Savoir accepter la vie quotidienne, c'est le vrai remède pour demeurer jeune! ' »

_ _ _

** Sans doute dans les environs de La Tuque : à La Bostonnais, à La Croche ou au Lac-à-Beauce.

*** Soeur Saint-Marc.
Mes tantes Éliane et Yvette Bergeron ont eu comme patronne cette sœur Saint-Marc, qui fut la directrice du couvent à La Tuque. Surnommée la « Grande Générale », elle semait la terreur chez les enseignantes et les élèves.


Éliane comptait Françoise Gaudet-Smet (1902-1986) parmi ses amies d’études. Cet exemplaire, fortement défraîchi, du premier ouvrage de cette dernièere, Derrière la scène (Drummondville, « La Parole », 1930), des chroniques, avait été donné à Éliane par son auteure, qui le lui avait autographié. L’illustration de la couverture est de Simone Routier (1901-1987). qui, l’année précédente, avait remporté le prix David pour son recueil de poèmes L’Immortel Adolescent (Éditions Le Soleil, 1928). Elle a aussi signé de nombreux textes du pseudonyme de Marie De Villers et celui de Tante Marie..
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lundi 1 décembre 2008

LES VOYAGES OUTRE-MER DU CURÉ CORBEIL

(XVIII)

Le long périple de 1925

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Causerie du 10 mai 1925 (Quinzième tranche)

R O M E

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« C’est la ville merveilleuse par son passé, la ville aux grandes et majestueuses églises, la ville avec ses reliques qui nous racontent si bien l’histoire du passé, surtout la ville où est notre chef spirituel, et où se trouve le plus beau et le plus grands des monuments du monde : Saint-Pierre de Rome. Je remets à plus tard de vous parler de Rome.

J’aurais voulu vous décrire un peu la ville, le climat et la beauté de la Côte d’Azur, mais il faut se borner. Je ne vous dirai qu’un mot de Paris pour terminer cette soirée. »

(À suivre)

Notre conférencier a sans doute précipité son propos : ses commentaires sur les lieux qu’il a visités en Europe sont plutôt brefs.

Cartes postales rapportées d'Europe par EugèneCorbeil.

Archives de Micheline-Raîche Roy.


Deux photos aimablement prêtées par Alice Lamothe Lilley

et prises à Rome par l’un des frères Pagé.

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dimanche 23 novembre 2008

LES VOYAGES OUTRE-MER DU CURÉ CORBEIL

(XVII)

Le périple de 1925 : de Marseille à Londres

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La France

La Côte d'Azur

Petit intermède familial

J’interromps la publication de la causerie d’Eugène Corbeil – elle reprendra dans ma prochaine page – mais je présente le contenu de deux envois du curé à Léo et Éliane Bergeron qui s’inscrivent dans la chronologie des événements abordés jusqu’ici.

Pour la dernière partie de la croisière, il nous faut faire preuve d’imagination et ne se fier qu’aux cartes envoyées par le curé de Marseille et de Nice.

Le navire aurait quitté l’Égypte, probablement d’Alexandrie, le port le plus près du Caire, pour traverser la Méditerranée et accoster à Marseille, en France, là où se terminait, je crois, la croisière. Nos trois voyageurs sont sans doute descendus du paquebot qui retournait à son point de départ, New York. Et c’est probablement en train qu’ils ont ensuite longé la côte, vers Nice, Menton et remonté vers Rome, objet de la prochaine tranche de la causerie.

Je n’ai aucune carte de Rome, mais Corbeil en a sûrement rapporté, car il a demandé à Éliane, sur une des cartes reproduites ici, de lui en garder quelques-unes. Elles doivent être dans des archives qui demeurent introuvables, malgré mes recherches.

Deux des cartes expédiées de France à La Tuque ont été adressées à Léo Bergeron, le frère d’Éliane. Le jeune homme était un protégé du curé qui a généreusement aidé financièrement des jeunes gens doués à poursuivre leurs études classiques et universitaires.

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Marseille, 16 fév. 1925

Mon cher Léo,

Enfin je suis à Marseille après 35 jours de voyage bien intéressant au milieu d’un groupe d’Américains et de Français vraiment distingués. – J’ai été traité par tous avec la plus grande sympathie et je suis fort heureux des relations que j’ai liées sur le bateau. – Mais comme tu le comprends, tout cela ne pouvait me faire oublier ma chère paroisse et mes amis. Aussi j’avais bien hâte d’arriver à Marseille

[La suite est rédigée sur une carte que j’avais remise à Léo et que je n’ai pu récupérer.]

[Il manque ici une carte qui poursuivrait le texte. MRR]


Mlle Éliane Bergeron

La Tuque

Co. Champlain

PQ

Canada

Marseille, 16 fév. 1925

Ma très chère enfant,

Enfin après 35 jours de belle navigation, en compagnie charmante et après avoir parcouru et visité l’Orient, j’arrive à Marseille où je vais rencontrer tous les miens. – Quelles heures heureuses je viens de passer à vous relire tous. – J’ai lu et relu tes deux lettres du 13 et 14 janvier, celle de Sr. Supérieure, d’Yvette et de Léo et d’autres. Merci. – C’était du soleil et de la chaleur pour mon cœur alors que le mistral soulevait la Méditerranée et jetait de la pluie en abondance sur toute la côte. – Il nous est arrivé une aventure à Monaco.

[Note : Yvette est la sœur de Léo et Éliane.]

[...]

Elle s’est terminée un peu brusquement, mais c’a été en somme une très belle croisière.– Maintenant, nous irons à l’aventure, sans programme fait à l’avance. Demain, nous irons nous installer à Nice pour quelques jours et nous y trouverons plusieurs amis. Je suis heureux de savoir que tu te reposes à 4 hres. C’est l’heure qui convient le mieux (à mon avis) pour te remettre des fatigues de la journée. – J’ai lu avec un grand intérêt et agrément les deux lettres mauves et roses. – Je te dirai à mon retour le plaisir que j’ai eu à les lire. Tu écris bien; continue.
Je t’écrirai plus tard.
E. C. ptre

Cannes,

17 fév. 1925

Vive la Côte d’Azur, la bien nommée. Je t’envoie des effets de vagues que je n’ai pas vues mais qui sont réelles tout de même. Nous serons à Rome la semaine prochaine.

Sincèrement

E. C. pt.

Menton, 20 février 1925

Ma chère Éliane,

Toi qui aimes tant les parfums (ce qui n’est pas un reproche, au contraire, puisque aimer le bon et le respirer se lient comme la cause et l’effet), tu seras intéressée d’apprendre que je suis allé visiter une usine qui fabrique des parfums. – Là j’ai appris bien des choses que je ne savais pas, à savoir que la graisse de porc mêlé à la graisse de bœuf sert à extraire des fleurs les sucs parfumés, ensuite avec de l’alcool ou du pétrole on extrait de la graisse le parfum. – Puis il faut 10 tonnes de fleurs pour avoir 2 lbs de parfum. Avec les résidus, on fait les savons parfumés, etc. Voilà maintenant les mois [?] souvenirs de fleurs pour la fabrique de parfums. Ici c’est un coin du paradis puisqu’il n’y a pas d’hiver et que les arbres ont une vie éternelle. À peine les vieilles feuilles sont-elles tombées que déjà les bourgeons surgissent. Actuellement tous les arbres fruitiers sont en fleurs. – C’est un spectacle délicieux. Je t’apporte un peu de ce parfum liquide et solide. – J’imagine que tu le trouveras bon. – J’ai choisi celui que tu aimes (violette). Nous partons pour Rome demain soir et nous y serons samedi soir. Bons souvenirs.

Eug. C.

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Léo et Éliane Bergeron. La Tuque, 1906. Archives de Micheline Raîche-Roy.

Mon oncle, Léo Bergeron

J’ai prévu livrer dans un autre carnet un aperçu de l’histoire de ma famille. Je profiterai tout de même de celui-ci pour présenter mon oncle Léo, puisqu’il fut en quelque sorte le protégé de Corbeil qui lui permit de poursuivre ses études à l’extérieur de la ville.

Léo est né à Saint-Agapit, le 18 août 1905. Ses parents, Joseph-Honoré Bergeron et Élodie Paquet emménageront à La Tuque, sept ans plus tard. Léo fait ses études primaires au collège de La Tuque. Remarquant les aptitudes et l’intelligence du jeune garçon, le curé Corbeil conseilla à ses parents de lui faire poursuivre des études plus avancées avec, probablement, l’idée non avouée de le diriger vers la prêtrise. Le jeune homme revêtit la soutane pendant quelques mois, mais réalisa vite que ce n’était pas sa vocation. Il en prit conscience lors d’un séjour à l’hôpital , où il admira le dévouement des médecins qui l’ont soigné.

Léo avait fait son cours classique au collège de Sainte-Anne-de-la-Pocatière, puis ses études universitaires à l’université Laval, à Québec, où il reçut le parchemin de docteur en médecine, en juin 1932.

Léo Bergeron, finissant en médecine, juin 1932.

Archives de Micheline Raîche Roy.

Il entreprit sa carrière à La Malbaie, où il resta jusqu’en 1941, année où il achète la pharmacie de Maxime Comtois et sa clientèle, à La Tuque. Pendant 12 ans, il sera très apprécié de la population. À l'automne 1953, il s'installe à Sillery, car ma tante Germaine avait toujours rêvé de revenir dans sa ville natale. Il prend quelques mois de repos et, en avril 1954, il est médecin à la Commission des accidents du travail. Reconnaissant sa compétence, la Commission le nomme médecin-chef, poste qu’il occupera de 1967 à 1972.

Il est décédé le18 janvier 2001 chez son fils Jacques, à La Tuque, où il demeurait depuis le décès de son épouse.

La pharmacie Bergeron, en 1945, au 66, rue Saint-Joseph, à côté de ce qui était jusqu’à récemment l’épicerie J. A. Bertrand, devenue une boutique de location de DVD et de VHS, entre les rues Saint-Antoine et Saint-Louis. Le numéro civique deviendra le 332. Plus tard, ce furent la Pharmacie Marchand, la Mercerie Leblanc, propriété alors de Claude Cantin, puis un petit bar, qui occupèrent successivement le rez-de-chaussée de l'édifice. Actuellement, c'est une boutique d'articles du terroir tenue par deux jeunes femmes de La Bostonnais. Le dentiste Albani Sirois y eut son cabinet à l'étage pendant plusieurs années.

Photo tirée du site « Souvenirs du Dr Max Comtois », http://drcomtois.situs.qc.ca/emma.html.

À son arrivée à La Tuque, en 1941, la famille du médecin vivait à l’étage. Je me souviens qu'il y avait des clapiers dans la cour arrière. Un escalier montait du rez-de-chaussée au logement. Et le bureau d'oncle Léo était à l'arrière de la pharmacie.

Autre souvenir. Il y avait un comptoir où l'on servait la Melorol, cette glace en forme de rondelle entourée de carton, qu'il fallait déchirer avec précaution pour en extraire la crème glacée. Vers 1950, j’allais aider tante Yvette, gérante de la pharmacie, à servir les nombreux clients, le dimanche matin, après la messe.

Annonce tirée du St. Maurice Valley Chronicle. Celle de la Pharmacie Marchand, page 42 de la section des pages jaunes du bottin téléphonique de Télébec pour La Tuque et la Haute-Mauricie, publié en décembre 1970, précise que Jacques Marchand, son propriétaire, est "pharmacien et chimiste" (il est détenteur d'un B. A., d'un B. Ph. et d'une L. Ph.) et que son commerce vend toujours des "Bonbons Laura Secord".

En août 1932, Léo avait épousé Germaine Jalbert, la petite-fille de Damase Jalbert, le fondateur du célèbre village industriel de Val-Jalbert (http://www.sepaq.com/ct/val/fr/photos.html), au Lac-Saint-Jean, devenu un site historique.

Léo Bergeron et Germaine Jalbert posant devant l’édifice du parlement canadien, à Ottawa, le 27 août 1932. Archives de Micheline Raîche Roy.

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jeudi 13 novembre 2008

LES VOYAGES OUTRE-MER DU CURÉ CORBEIL

(XVI)

La croisière de 1925

(La dernière escale)

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Causerie du 10 mai 1925 (Quatorzième tranche)

LE MOYEN-ORIENT

B E T H L É E M

« Nous nous rendons à Bethléem, où nous pouvons visiter la grotte où le Christ est né, la crèche où il a reposé. C’est là, l’endroit où saint Jérôme a vécu, l’endroit où il a écrit la Bible. La culture de cette ville est des plus intéressantes.

Nous continuons notre route vers Le Caire. »

Bethléem. Le marché. Carte rapportée par Corbeil.

Philias Pagé, devant le puits de Jacob, situé près de Shechem.

Photo gracieusement fournie par Alice Lamothe Lilley.

Joseph-Henri Pagé, au puits de Jacob.

Photo gracieusement fournie par Alice Lamothe Lilley.


L E C A I R E

« Nous traversons le désert de Syrie, le canal de Suez. C’est le canal qui traverse le désert. »

Scène croquée au Caire par l’un des frères Pagé.

Photo gracieusement fournie par Alice Lamothe Lilley.

« Le Caire est la plus belle ville de l’Orient; il y a là les plus beaux palais, de grands hôtels, Presque tous les Arabes parlent le français. Nous visitons les pyramides, immenses monuments élevés à la gloire des dieux par les Hébreux; elles ont jusqu’à 1 000 pieds de base et de 30 à 50 pieds de hauteur. Ce sont des immenses blocs de pierres superposées.

À côté des pyramides se trouve le sphinx. »

Cachet du Providence, apposé au verso d'une carte rapportée par Corbeil.

« Les Arabes sont un peuple déchu, un peuple qui n’a pas le courage de se relever et qui se plait dans sa mendicité. Il a gardé ses anciennes mœurs. Il ne travaille pas ou travaille très peu. Il ne se construit pas de maisons, il ramasse ici et là quelques poches qu’il met sur quatre poteaux pour lui servir d’abri.

Tout le long du jour, il chante, il flâne en rêvant de sa gloire passée. Nous revenons de notre croisière par Mess[ine], Monte-Carlo, villes remarquables par leurs végétations [sic], après avoir passé 35 jours en mer. »

(À suivre)

Monte-Carlo.

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Transcription du texte de la carte postée à Éliane Bergeron, à La Tuque.

N.B. – As-tu reçu mes cartes et mes lettres.

Je vous ai écrit bien souvent. –

Voilà le palais où viennent s’engloutir de belles fortunes.

Monaco est un coin merveilleux, où il n’y a que deux

saisons : le printemps et l’été. –

Je t’écrirais de Nice où je serai bientôt.

Bien sincèrement.

Eug.

Je n’oublierai pas à Rome Estelle et St-Stanislas.

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C’est par la visite en Égypte que semble se terminer la croisière en Méditerranée d’Eugène Corbeil et des frères Joseph-Henri et Philias Pagé.

La portion terrestre du voyage se poursuivra sur la côte d’Azur, à Rome et à Paris.

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Un tableau quasi surréaliste.

Eugène Corbeil, Philéas et Joseph-Henri Pagé jouant aux rois mages en Égypte.

Une drôle de photo, plutôt statique, qui a sûrement d’abord été développée en noir et blanc, puis colorée. L'ombre projetée par les chameaux indique que l’éclairage provient de plusieurs sources, ce qui porte à croire qu’elle a été exécutée dans un studio, sans doute au Caire.

Encadrée, elle a été remise à la Société historique de La Tuque et du Haut Saint-Maurice par Alice Lamothe-Lilley.

Alice Lamothe Lilley a confié le rare artéfact à Raoul Maillet, de la Société historique de La Tuque et du Haut-Saint-Maurice (http://www.shlt.info/).

Photo : Micheline Raîche Roy.


NOTES

Le récit impliquant Rachel et Jacob est une belle histoire d’amour racontée dans la Bible (Genèse, 29). Jacob rencontra Rachel au puits et fut ébloui par la jeune fille, Pour la mériter, il dut travailler sept ans pour son père, Laban, avant de pouvoir l’épouser, mais celui-ci lui donna plutôt son autre fille, Léa, car l’aînée devrait se marier avant la cadette.

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Depuis les campagnes napoléoniennes, l’Égypte toujours accueilli une communauté francophone importante. Et jusqu’en 1956, l’année de la crise du canal de Suez, la langue française y a joué un rôle important.

Encore de nos jours, selon les dernières statistiques de 2008, environ 1,7 million de jeunes Égyptiens étudient le français comme langue seconde dans le pays. Au Caire seulement, on en compte 45 000 dans les 72 écoles dites « bilingues », sous l’enseignement de 2000 professeurs, et 1600 au lycée français. (Source : Wikipedia)

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dimanche 2 novembre 2008

LES VOYAGES OUTRE-MER DU CURÉ CORBEIL

(XV)

La croisière de 1925

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Causerie du 10 mai 1925 (Treizième tranche)

LE MOYEN-ORIENT

J É R U S A L E M

« Nous continuons notre route et nous arrivons ainsi à Jérusalem. C’est la ville aux grands souvenirs, la ville fameuse. Le pèlerin qui arrive là est nécessairement un peu déçu, car Jérusalem n’est pas la même aujourd’hui qu’autrefois. C’est la capitale de la Palestine. Nous visitons le Champ des Oliviers, c’est-à-dire le jardin qu’on dit avoir existé du temps de Notre Seigneur. Cette ville nous rappelle l’Ascension de N. S. et on nous fait remarquer la pierre où il a laissé sa trace avant de s’envoler aux cieux. Nous remarquons également l’église de Saint- Joseph; là, nous pouvons voir un panneau renfermant le Pater, écrit en toutes les langues de la terre. »

Jérusalem. Le mont des Oliviers. Carte rapportée par Corbeil.

« Nous visitons la voie douloureuse; c’est tout autre chose. Rien n’est changé de ce qui devait exister du temps de N. S. Sans doute la ville fut détruite, les maisons, refaites, mais il n’y a rien de religieux. Tout le monde s’occupe de commerce, ce n’est qu’une question d’argent. Nous revoyons ces choses là, partout dans les églises, dans les temples, dans les lieux où on va retrouver ces grands souvenirs. Il n’y a pas de prières, il n’y a que du commerce. »

Le chemin de croix : cinquième station. Carte rapportée par Corbeil.

« La population est composée d’Arabes, de musulmans, de Turcs, de Juifs et d’Arméniens. On vit de l’histoire passée et, avec les gloires passées, on fait du commerce. Il en est ainsi de Jérusalem. Le Sépulcre et le Calvaire sont au milieu de la ville. Ses rochers sont couverts avec du marbre, de l’or ou encore des pierres précieuses. Nous pouvons voir que le rocher est identique, car nous constatons les étroits trous qui ont servi aux trois croix. On montre le Saint Sépulcre, personne ne prie et on ne sent pas le besoin de prier. D’ailleurs, il serait impossible de se mettre à genoux, vu l’affluence de la foule, c’est lamentable. Cependant, c’est tout de même consolant, car c’est une des plus belles preuves de la divinité du Christ : " Quand je serai disparu, on se battra pour posséder mon tombeau. " Nous visitons le palais de Pilate et c’est avec émotion que nous repassons l’histoire de la flagellation, le couronnement d’épines. »

(À suivre)

L'intérieur du Saint-Sépulcre. Carte rapportée par Corbeil.

Pause sur une route de la Palestine. Corbeil, en compagnie de Joseph-Henri et Philias Pagé. Photo gracieusement fournie par Alice Lamothe Lilley.

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J’aurais pu inscrire LES VENDEURS DU TEMPLE en guise de sous-titre à cette page, tant mes leçons catéchisme, d'évangile et d’histoire sainte sont encore bien présentes, incrustées dans ma mémoire! Treize ans d'instruction et d'éducation chez les religieuses laissent des traces. Je dois tout de même avouer que les dames de la Congrégation de Notre-Dame étaient moins moralisatrices que d'autres…

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Rien n'a changé dans les lieux de pèlerinage. Pensons à Sainte-Anne-de-Beaupré, où la rue menant à la basilique est occupée par des boutiques bourrées de « bondieuseries » et objets du même acabit.

Il faut voir, à Cap-de-la-Madeleine, le déplacement répété de pèlerins et de pèlerines se ruant vers le magasin. En voulez-vous des chapelets ? Des médailles ? Des crucifix ? Des images saintes ? Mais on y trouve aussi de ravissantes crèches, des statuettes de porcelaine, des CD de belles musiques classiques et grégoriennes.

J'ai beaucoup de difficultés à croire à ces endroits où, par exemple, on voit la supposée trace des trous des trois croix au Calvaire, la pierre portant l'empreinte des pieds de Jésus avant son ascension. Pensez-donc, il y a plus de 2000 ans de cela !

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